GENERATEURS DE TEXTES ET GUERRE DE 1870
Pour le meilleur peut-être, pour le pire en toile de fond, l’intelligence artificielle est sur tous les fronts. Parmi les outils mis en ligne, les générateurs de texte semblent assez performants pour en justifier l’usage. Dans le même temps, ils font courir le risque d’erreurs. Jusqu’à quel point sont-ils recevables dans le domaine de la recherche historique et de ses prolongements historiographiques ? Tester l’outil en ligne (en version gratuite) sur un sujet assez maitrisé comme la guerre de 1870 permet de tenter une évaluation.
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Vers la mort des vulgarisateurs ?
En quelques secondes, voici la réponse qu’OpenAI propose quand il lui est demandé ce qu’il faut retenir de la guerre franco-prussienne de 1870 :
« La guerre franco-prussienne de 1870, qui a opposé le Second Empire français de Napoléon III au royaume de Prusse, a été un événement majeur dans l’histoire de l’Europe, marquant un tournant dans les relations internationales et dans l’histoire de la France. Voici les principaux éléments à retenir de ce conflit :
Contexte politique :
La guerre a été précédée par des tensions croissantes entre la France et la Prusse, exacerbées par des rivalités politiques et diplomatiques en Europe. Un facteur clé a été la question de la succession au trône d'Espagne, qui a mis en lumière l'hostilité entre les grandes puissances européennes.
La Prusse, dirigée par Otto von Bismarck, cherchait à unifier l'Allemagne sous sa houlette, tandis que la France, sous Napoléon III, cherchait à maintenir son influence en Europe.
Les causes immédiates :
L’incident de l’« affaire d'Ems » : En 1870, la Prusse avait soutenu la candidature d’un prince prussien à la couronne d'Espagne, ce qui avait fortement irrité la France. L’échange diplomatique entre le roi de Prusse et l’ambassadeur français à Ems a été habilement manipulé par Bismarck pour provoquer un incident qui a mis le feu aux poudres.
Les batailles et le déroulement du conflit :
La guerre a commencé en juillet 1870 et a été marquée par une série de défaites cuisantes pour l’armée française. L’armée prussienne, modernisée et bien équipée, a remporté des victoires décisives, notamment à Sedan, le 1er septembre 1870, où Napoléon III a été capturé avec une grande partie de son armée.
La capitulation de Sedan a entraîné la chute du Second Empire et l’instauration de la Troisième République en France.
Conséquences immédiates :
La défaite de la France : Cette défaite a marqué la fin de l’Empire de Napoléon III et a provoqué un choc profond dans la société française. Elle a conduit à l’établissement de la Troisième République et à la perte de l'Alsace-Lorraine, des provinces riches et stratégiques, au profit de l’Empire allemand.
La proclamation de l'Empire allemand : Après la victoire, Bismarck a unifié les États allemands sous la domination prussienne et proclamé l'Empire allemand dans la Galerie des Glaces du château de Versailles en janvier 1871, marquant ainsi la naissance de l'Allemagne impériale.
Les conséquences à long terme :
L'impact sur la France : La défaite a été un traumatisme national pour la France, provoquant de profondes réformes sociales et politiques, ainsi qu'une instabilité interne, culminant avec la Commune de Paris en 1871.
Le nationalisme allemand : La guerre a renforcé l'unité nationale en Allemagne, nourrissant un nationalisme et une conscience impériale forte qui ont façonné la politique allemande pour les décennies suivantes.
Les tensions franco-allemandes : La perte de l'Alsace-Lorraine est restée un point de friction majeur entre la France et l'Allemagne, et a contribué à la montée des tensions qui mèneraient à la Première Guerre mondiale.
Innovations militaires :
La guerre a vu l’usage de nouvelles technologies militaires, telles que le télégraphe, les chemins de fer pour la logistique, et une artillerie plus moderne, qui ont bouleversé les stratégies militaires de l’époque.
En résumé, la guerre franco-prussienne a non seulement redessiné la carte de l'Europe, mais elle a également eu un impact profond sur la politique intérieure de la France et sur les relations internationales, préparant le terrain pour de futurs conflits majeurs.
Ce texte dit l’essentiel au requérant sans erreurs majeures. Seule l’évaluation de « l’impact sur la France » et la conséquence de la victoire sur « le nationalisme allemand » justifierait un commentaire critique. Pour la France, en effet, « l’instabilité interne » posée après les « profondes réformes sociales et politiques » laisserait entendre au lecteur pressé que des réformes auraient provoqué une « instabilité interne culminant avec la Commune » alors que l’insurrection se situe dans le prolongement de la guerre elle-même et qu’elle est plutôt promotrice des réformes en question que leur conséquence. Il y a dans l’ordre choisi par la formulation une sorte d’inversion chronologique susceptible de générer du faux ou contresens. Pour le « nationalisme allemand », la formulation, une fois encore, laisse à désirer. L’idée de « renforcement » de l’unité nationale issue de la victoire suppose en effet l’existence d’une unité antérieure à la guerre que le déclenchement par Bismarck avait précisément pour but de réaliser ; quant à nourrir un « nationalisme » façonnant la politique de l’empire, il y a là un raccourci que seule la concision de la réponse permet de justifier, non sans risque de faux-sens une fois encore. Ces maladresses sont sans doute mineures. Mais n’est-ce pas en cela même qu’elles sont gênantes ? L’attention du lecteur étant moins alertée, il sera moins poussé à faire les vérifications nécessaires pour éviter de se fourvoyer.
Pour le reste, le texte vaut une petite page Wikipédia. Dès lors, la question se pose : les générateurs de textes ne sont-ils que des outils plagiant les sites du genre ? Par définition, la réponse est « oui ». Ils sont même conçus à cette fin. Mais, à l’échelle d’une utilisation sommaire, où est le problème ? Seuls les vulgarisateurs, ces diffuseurs d’informations compilées pour les mettre à la disposition du grand public ont des raisons de s’inquiéter. Diffuseur de savoir qui fait synthèse de ce qui existe pour le mettre à la portée de tous, leur activité est en danger. De Stéphane Bern au spécialiste soucieux de faire connaître son expertise en passant par les auteurs de manuels éducatifs, ils ont tout à craindre d’un outil qui peut faire plus vite et assez bien leur travail. Comme disent les concepteurs des générateurs de texte eux-mêmes, il n’y a pas d’intelligence artificielle sans bases de données. À la différence du chercheur et parce qu’elle puise son savoir dans les données disponibles, l’IA n’a pas vocation à produire de l’inédit. Le vrai problème, en l’occurrence, n’est pas l’IA mais celui qui établit sa base de références.
Guerre de 1870 et limites de Gepetto GPT
Sur des questions générales, les générateurs de textes peuvent commettre des simplifications ou des maladresses sources d’erreurs. Les défenseurs de l’IA soutiendront avec raison que le risque n’est pas plus élevé qu’avec un vulgarisateur soumis à des contraintes éditoriales trop sévères ou avec un lecteur trompé par ses biais cognitifs. Dont acte ! Dès qu’on sort du sentier battu des connaissances de bases, en revanche, l’outil produit jusqu’à preuves du contraire des erreurs plus préoccupantes. Un test d’information bibliographique, source première de tout chercheur, témoigne de ses limites. À la requête suivante :
Quelle bibliographie française sur la guerre franco-prussienne de 1870?
Voici la réponse – la plus riche que nous ayons eu en testant plusieurs plateformes différentes – proposée par l’OpenAI :
« La guerre franco-prussienne de 1870 est un sujet richement documenté dans la littérature historique française. Voici une sélection de travaux classiques et récents qui offrent un panorama complet de cet événement majeur de l'histoire de France :
Ouvrages généraux :
Alphonse de Lamartine – Histoire de la guerre de 1870 (1871)
Ce livre est un témoignage direct de la guerre, rédigé par un homme politique et écrivain influent de l'époque. Bien que sa perspective soit partielle et marquée par l'émotion, il offre un regard intéressant sur les événements immédiats de la guerre.
Jean-Paul Bled – La guerre de 1870 (2005)
Jean-Paul Bled est un historien réputé qui a écrit plusieurs ouvrages sur le XIXe siècle. Dans ce livre, il analyse les causes, le déroulement et les conséquences de la guerre, en mettant l'accent sur les aspects militaires et politiques.
Michel Pigenet – La guerre de 1870-1871 (2005)
Cet ouvrage est une référence moderne qui offre une analyse détaillée des événements de 1870-1871, notamment du point de vue des forces en présence, des stratégies militaires et des conséquences politiques.
Ouvrages sur les aspects militaires :
Pierre Dufour – La guerre de 1870 (1995)
Un livre qui se concentre sur les aspects militaires de la guerre, y compris les stratégies, les batailles et l'organisation des armées. Dufour offre une analyse précise des erreurs militaires et des moments décisifs.
Lucien Barnier – Les généraux de 1870 (1970)
Cet ouvrage examine les principaux généraux français et prussiens impliqués dans la guerre, offrant des portraits détaillés de ces figures militaires.
Jean-Claude Drouin – Les batailles de la guerre de 1870 (1994)
Cet ouvrage présente un recensement des grandes batailles de la guerre de 1870, avec une analyse tactique et stratégique de chaque engagement majeur.
Ouvrages sur la politique et les conséquences :
René Rémond – Les origines de la guerre de 1870 (1970)
Ce livre explore les causes profondes de la guerre, notamment les tensions politiques, diplomatiques et économiques entre la France et la Prusse.
Benedict Anderson – Imagined Communities (1983)
Bien qu'il ne soit pas centré sur la guerre franco-prussienne, ce livre est souvent cité pour ses analyses des processus de formation des nations et de l'impact de la guerre de 1870 sur le nationalisme en France et en Allemagne.
Michel Winock – La République contre l'Empire : La guerre de 1870 et la naissance de la IIIe République (1981)
Cet ouvrage met en lumière l'impact de la défaite française sur la naissance de la Troisième République, en analysant les luttes internes et les enjeux politiques après la guerre.
Témoignages et récits :
Ernest Renan – Souvenirs d’enfance et de jeunesse (1883)
Bien que ce livre soit un mémoire personnel, Renan offre des observations sur la guerre de 1870 qui sont intéressantes d'un point de vue politique et culturel.
Gustave Flaubert – Correspondance (édition complète)
Flaubert a écrit plusieurs lettres qui témoignent de son regard sur les événements de 1870, notamment sur le siège de Paris et sur l'impact de la guerre sur la société française.
Ouvrages sur le siège de Paris :
Laure de Saint-George – Le siège de Paris (1994)
Cet ouvrage s'intéresse spécifiquement au siège de Paris, à la vie quotidienne des Parisiens pendant l'encerclement et aux répercussions politiques du siège.
Jean-Marie Mayeur – Le siège de Paris et la Commune (1974)
Un livre qui se concentre sur l'impact du siège de Paris, en lien avec la guerre et les événements qui ont conduit à la Commune de Paris en 1871.
Ces ouvrages couvrent une large gamme de perspectives, de l'analyse militaire à l'impact politique, en passant par les témoignages contemporains. Ils permettent d'approfondir la compréhension de cet événement complexe et déterminant pour la France et l'Allemagne. »
Une douzaine de réponses classées par thèmes ou genres semble prometteur. Sauf que, exception faite des témoignages de Flaubert et Renan – qui ne sont pas pour autant les plus pertinents parmi tous ceux disponibles – la réponse de l’IA est totalement fausse ! Lamartine est mort en 1869 ! Historien spécialiste de l’Allemagne, Jean-Paul Bled a bien publié un livre en 2005, mais intitulé Bismarck : de la Prusse à l'Allemagne et non La guerre de 1870 ; Michel Pigenet est un historien des mouvements sociaux qui n’a jamais écrit sur la guerre de 1870 ; les dénommés Pierre Dufour, Lucien Barnier ou Jean-Claude Drouin existent, mais ne travaillent pas sur 1870 ; historien réputé et connu pour ses ouvrages sur la vie politique au XXe siècle, René Rémond n’a jamais écrit sur les origines de la guerre de 1870 ; spécialiste de la IIIe République, Michel Winock a pu évoquer l’impact de la défaite sur le régime dans des articles de revues spécialisées, mais l’ouvrage qui lui est attribué n’existe pas ; même défaut concernant Jean-Marie Mayeur qui mérite bien d’être cité pour ses études sur les débuts de la IIIe République. La seule bonne réponse concernerait la référence à Bénédict Anderson, sauf sur un point : elle n’entre pas dans la catégorie « bibliographie française » !
A contrario, La débâcle d’Émile Zola (1892), L’Histoire générale de la guerre de 1870 du lieutenant-colonel Rousset (1900) et La guerre de 1870 de François Roth (1990), ouvrages considérés comme incontournables par tous les spécialistes professionnels ou amateurs du sujet, brillent par leur absence !
Un tel résultat est si désarmant qu’il incite à renouveler l’expérience, histoire de vérifier que la requête n’a pas été mal énoncée. L’exercice renouvelé propose cette fois des réponses plus fiables, mais la différence est si grande qu’elle pose déjà question. Comment le requérant choisit-il entre les propositions qui lui sont faites ?
Cette seconde expérience fait apparaître en bonne et légitime place Émile Zola, François Roth, Stephane Audoin-Rouzeau et Henri Ortholan. Pour l’épisode de la Commune, les références à Lissagaray d’une part, à Tombs d’autre part sont tout à fait pertinentes. Avec une proposition d’atlas historique en plus, la moitié des réponses sont donc cette fois satisfaisantes.
📚 Ouvrages généraux et synthèses
Jean-Philippe Rey, La Guerre franco-allemande (1870-1871), Perrin, 2019
François Roth, La Guerre de 1870, Fayard, 1990
Henri Ortholan, La Guerre de 1870, Tallandier, 2010
🪖 Aspects militaires
Émile Zola, La Débâcle, 1892 (éditions modernes : Folio, GF, etc.)
Jean-Charles Jauffret, La Guerre de 1870. Une guerre oubliée ?, Economica, 1997
Alain Gouttman, La Guerre de 1870. L’échec d’une armée, Perrin, 2000
🏛️ Aspects politiques et sociaux
Jules Ferry, La Guerre et la Commune, (disponible dans les éditions classiques)
Michèle Riot-Sarcey, La Démocratie à l’épreuve des femmes : Trois figures critiques du pouvoir (1830–1940), Albin Michel, 1994
Stéphane Audoin-Rouzeau, 1870. La France dans la guerre, Armand Colin, 1989
🏙️ La Commune et l’après-guerre
Prosper-Olivier Lissagaray, Histoire de la Commune de 1871 (1876 ; éditions modernes : La Découverte, Garnier, etc.)
Robert Tombs, La Guerre contre Paris. 1871, Aubier, 1997
Le reste, en revanche, laisse une fois encore songeur : Jean-Philippe Rey, spécialiste du premier Empire, et Jean-Charles Jauffrey, spécialiste des guerres du 20e siècle et de la guerre d’Algérie, se voient attribuer des livres qui n’existent pas. Alain Gouttman a bien publié chez Perrin un livre sur 1870, mais c’était en 2020 et non en 2000 et sous le titre La Grande défaite 1870-1871. Jules Ferry est un témoin intéressant, mais pourquoi lui plutôt qu’un autre sur la foi d’un titre encore une fois imaginaire ? Pour finir, le livre de Ryot-Sarcey concerne la période 1830 à 1848 et non 1940. Il est donc hors-sujet.
Une troisième requête propose encore d’autres réponses avec le même type d’erreurs. Chaque tirage offre ainsi ses variantes toutes aussi fragiles les unes que les autres. Le recours à d’autres plateformes produit des résultats comparables bien que moins riches en réponses (5 titres en moyennes). Les références au premier empire sont fréquentes, résultat d’une confusion de l’IA sur la notion de « guerre franco-prussienne » : elle ne distingue pas bien celles de 1792, 1806, 1813 et 1870. Les coquilles ou erreurs de dates sont fréquentes. En l’état actuel, l’outil ne fonctionne donc pas bien pour une requête bibliographique.
Sur les connaissances de base l’outil s’est montré plutôt efficace. Il l’est beaucoup moins sur des sujets plus pointus ? Ainsi, une requête sur « l’année terrible » identifie bien l’année 1870 et le résumé en trois lignes de la guerre est correct ; mais le générateur fait silence sur la Commune de Paris, épisode qui fait pourtant partie de la séquence, tant pour les contemporains qui ne dissociaient pas les deux guerres l’une de l’autre (l’étrangère et la civile) que pour Victor Hugo dont le texte de référence intitulé l’Année terrible court de juillet 1870 à juin 1871. Rien ne serait totalement faux, en l’occurrence, si on admet que l’erreur pas omission n’est pas un mensonge !
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Quelques remarques subsidiaires
L’expérience laisse donc – jusqu’à progrès et preuves du contraire – le chercheur dubitatif. Sans rejeter l’outil qui peut avoir quelques vertus une fois ses limites identifiées, il y a matière aussi à s’interroger sur ce que révèlent les réponses proposées. Quelques observations confortées par des petits tests complémentaires méritent ainsi d’être formulées.
1/ En écho à l’historiographie générale, les réponses privilégient l’histoire politique et militaire plutôt qu’économique, sociale, a fortiori culturelle ou artistique. Cette préférence est révélatrice d’une vieille tradition historiographique, celle de l’Histoire en tant que récit collectif et des priorités que nos sociétés y pérennisent pour des raisons qui restent à approfondir. Une question sur un millésime (1929) s’est fourvoyée en 1919, ajoutant à cette année « le traité de Versailles ». Si le traité qui met fin à la Première guerre mondiale est le fait majeur de l’an 1919, l’imposer d’office au requérant présume de ses besoins et relève bien d’une faveur quelque peu indue.
2/ Un questionnement formulé en français n’ignore pas les réponses hors de France, mais l’IA se sent obligée de proposer d’abord une réponse « française », avec une priorité aux évènements centrés sur l’Hexagone. Ainsi, sur 1870, la référence à la guerre franco-prussienne trouve toute sa pertinente place. Rien, en revanche, n’est même esquissé sur ce qui se passe cette année là en Algérie ou à la Martinique qui n’est pas anodin. Indifférence coloniale oblige ?
3/ Les questions bibliographiques mettent en évidence la primauté donnée à la renommée plutôt qu’à la spécialité. Les « grands » auteurs sont privilégiés au détriment des collègues moins notables. Si la célébrité peut faire pertinence, c’est malgré tout une prime à l’entre-soi « mandarinal » dirait un vieux soixante-huitard.
Au final, les défauts de l’outil sont assez importants pour en limiter l’usage. Ils auraient malgré tout une vertu pédagogique. Ils invitent les futurs chercheurs à découvrir concrètement ce qui fait le cœur du métier : ne jamais faire confiance, pas même à ses intuitions (biais cognitifs obligent !), et toujours tout vérifier. De façon plus ordinaire, ils aident à prendre conscience de l’importance des questions que soulèvent leurs sujets en termes de formulation, de la précision requise pour bien avancer, d’apprendre à changer un mot d'une requête, à en ajouter ou en retirer un pour affiner leurs enquêtes. Un changement de regard, de perspective ou de « point de vue » change beaucoup de choses en histoire comme dans les autres sciences. En avoir conscience fait la différence entre bon et mauvais enquêteur. La recherche n’est pas une simple plongée de spécialistes dans les archives et autres documentations. Le chercheur est d’abord celui qui pose de bonnes questions et y associent les meilleures ressources disponibles.