LES CHIENS DANS LA GUERRE DE 1870
L’image du chien dans le cadre du siège de Paris en 1870-1871 est bien connue. Elle illustre un de ces savoirs qui survivent à l’oubli ou à l’ignorance du grand public parce qu’elle nourrit les anecdotes amusantes dont celui-ci est friand. La question de la place des chiens dans les conflits modernes mérite toutefois l’attention dès lors qu’elle peut être liée à l’apparition des unités cynophiles dans les armées modernes. Dans quelle mesure cette mobilisation des chiens au service des armées est-elle un héritage de l’Année terrible ? En 2014, Olivier Berger[1] s’est employé à répondre à la question pour l’Île-de-France. L’absence d’archives et la dispersion des sources lui rendirent l’exercice difficile et il se refusa le droit de tirer généralisations de ses observations. Aujourd’hui, les outils numériques permettent d’élargir le champ des sources sans que leur dispersion ne décourage le chercheur. Si le rôle des chiens à des fins militaires n’était pas encore bien fixé en 1870, leur utilisation plus ou moins improvisée par les acteurs de la guerre permet de comprendre l’image ambivalente alors attachée à l'animal.
Images ambivalentes du chien
En février 1871, Théophile Gautier présente ses Tableaux du siège dans lesquels il évoque le cas des animaux pendant le blocus de la capitale. Les chiens y occupent une bonne place. L’auteur distingue chiens errants « suburbains » et « chiens des villes », tous pourtant condamnés à finir en simples produits de consommation. Ce propos plus littéraire que scientifique est celui d’un Parisien qui voit la guerre depuis les remparts de la ville assiégée. D’autres sources (mémoires, correspondances, journaux intimes, articles de presse) confirment toutefois le regard de l’écrivain. Tout et son contraire se dit sur le compte des chiens. Un animal peut même être présenté comme le fidèle compagnon objet de toutes les attentions avant d’être mangé quand les pénuries y contraignent. Ainsi, le 20 janvier 1871, un couple de rentiers sacrifie le bien nommé Bijou : « Le repas terminé, elle [sa maîtresse] dit avec des larmes dans les yeux : “Comme ce pauvre Bijou se serait régalé !”"[2]. La situation perturbe si bien les Parisiens qu’elle oblige les autorités à justifier le « crime ». Le Petit Moniteur universel du 30 octobre 1870 (p. 2) rappelle que les religieux donnaient du chien à manger aux pauvres lors du siège de 1590.
L’ambivalence du chien se pose aussi en termes de sécurité. Dans le Journal des débats politiques et littéraires du 2 octobre 1870, le docteur Charles Daremberg alerte les autorités sur le problème des chiens errants : danger de rage, d’infections, d’agressions... Au même moment, Francisque Sarcey publie dans Le Gaulois un article aussi « spirituel » que remarqué sur la nécessité d’éliminer « ces bouches inutiles ». Le texte indigne les maîtres. La lettre ouverte de l’un d’eux est publiée dans La Liberté du 20 octobre. Ces « bouches inutiles » sont indispensables pour la préservation du moral des assiégés ou pour alerter d’un mouvement ennemi, la nuit en particulier.
L’ambivalence se lit encore sur un terrain inattendu : le foisonnement ou la disparition des métiers liés au chien. D’un côté, les chasseurs de chiens, « un des types les plus curieux de ce siège » (Le Tribun du peuple, 24 novembre, p. 2), et les bouchers de viande canine, de l’autre les toiletteurs (Petit-Journal du 16 décembre, p. 2). L’information fait écho du débat en cours. Ce dernier invite à dresser une typologie pour aider à mieux saisir les enjeux que recouvre l’ambivalence qui le nourrit.
Chiens errants et de boucherie
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Les chiens de 1870 sont d’abord les "errants" qui finissent au menu des restaurants ou sur l’étal des bouchers. Les caricatures abondent sur le sujet. Avec L’heure des fauves, Louis Baader met en scène cet aspect sinistre des chiens se métamorphosant en bêtes sauvages à l’égal des hommes détrousseurs de cadavres. L’œuvre entend montrer l’envers du décor de la guerre. Elle montre aussi que la question des chiens dans la guerre n’est pas une affaire strictement parisienne. Le témoignage de Valentin Durhone relatif au siège de Neuf-Brisach va dans le même sens : « Les carcasses de six bêtes [des bœufs] gisaient encore mais vides et proprement nettoyées", raconte-t-il. "Des chiens errants, qui nous accueillirent en montrant les dents, achevaient la curée ».
Bêtes abandonnées, les chiens hantent Les charniers de Sedan décrits par Camille Lemonnier. Dépouilles de chiens, bêtes efflanquées rôdant autour du champ de bataille, compagnons affamés des maraudeurs (p. 115). L’horreur est partout : « D’affreux chiens maigres s’approchaient (...), l’oreille basse, l’œil vitreux, la queue dans le ventre, et passaient la langue sur leurs plaies. » (p. 189).
Sedan est-il un cas particulier ? Ni plus ni moins que les autres territoires envahis. Depuis son ballon, Albert Tissandier survole des régions désertées où il n’entend que les chiens abandonnés (Mémorial de la Loire et de la Haute Loire du 20 octobre, p. 2). Ces chiens sont aussi l’objet de jeux. Selon l’abbé Sterlin, ils servent de cibles pour les mobiles. À Paris, le problème accable les territoires situés entre les deux lignes de défense que ne fréquentent plus que les maraudeurs et les patrouilles. Dans Le Rappel du 17 octobre (p. 2), un entrefilet assure que les hommes du fort d’Issy ont réuni dans leurs casemates 300 chiens abandonnés. Dans Le Peuple français du 25 octobre 1870 (p. 2), un lecteur évalue à 200 000 le nombre de chiens circulant dans la capitale. Ce chiffre ne peut être validé, le mode de calcul n’étant même pas précisé. « La quantité de chiens perdus est incalculable » assure la rédaction du Soir du 20 octobre (p. 3). Le problème n’en ponctue pas moins avec constance les pages des journaux et des récits de souvenirs. A contrario, Gabriel Chausson observe en janvier que « les chiens errants, très nombreux en octobre, ont tous disparus ».
Réalité bien documentée, le marché du chien à Paris se porte bien. Selon la presse, il apparaît en octobre, se généralise en novembre et fait céder les dernières répulsions des consommateurs en janvier. Estimé à 1 fr. 25 la livre en moyenne pendant la durée du siège, le prix monte jusqu’à 3 fr., montant qui n’est pas à « la portée des petites bourses » assure Victor Edelga (p. 45). Ce qui est vrai à Paris se retrouve dans les autres villes assiégées (Belfort, Péronne, Neuf-Brisach…). L’animal se négocie au gré des besoins. À Moulins, le franc-tireur Paquereau vend deux chiens qui le suivent depuis Bordeaux contre une oie qu’il mange avec ses camarades pour fêter le 1er janvier[3]. Le chien, ce « chevreuil du ruisseau », est au menu des restaurants parisiens comme dans la gamelle des mobiles en province.
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Quelques cas particuliers témoignent encore de la diversité des usages. À Orléans, le lieutenant-colonel von Groevenitz ordonne le 27 octobre que les habitants circulant de nuit dans la ville portent une lanterne « répandant une lumière suffisante pour reconnaître le porteur ». En réponse, les Orléanais organisent une nuit aux lanternes au cours de laquelle ils sortent équipés de lampions ; certains en pourvoient des chiens, créant une telle confusion que le décret est aussitôt suspendu[4]. Les facéties dont les chiens sont l’objet se déclinent en matière de surnom. Les chiens baptisés Bismarck ou Guillaume (un sur deux assure le Figaro du 7 octobre) traduisent le rôle d’exutoire qu’ils peuvent avoir. Le capitaine Aragonnès d’Orcet (p. 35) observe le phénomène dès le 2 août dans la commune de Fénétranges. Jules Clarétie (p. 163) confirme la pratique qu’il pose précisément comme « un rôle » attribué aux chiens. De fait, le chien est une victime plus ou moins expiatoire de la guerre. Mais il en est aussi un acteur militaire.
Chiens de troupes
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Beaucoup de chiens sont des membres à part entière des unités auxquelles ils sont attachés. Ce sont d’abord des bêtes de qualité, propriétés d’officiers. La pratique est courante dans les rangs des troupes allemandes. Le neveu d'Helmuth von Moltke fait campagne avec son chien, un « dogue tigre » qu’il égare[5] ; le général von der Tann arrive à la préfecture de Châteaudun accompagné de ses chiens[6]. Cette tradition était déjà observée en Crimée, en Italie ou dans les campagnes du 1er Empire. Source d’images émouvantes, les meilleurs peintres s'empressent de la mettre en scène : Anton von Werner figure le chien du général Douay couché sur la dépouille de son maître, Édouard Detaille celui du Tambour-major de la garde impériale dans le panorama de Rezonville. Au gré des récits de souvenirs, les exemples abondent. Ricciotti Garibaldi (p. 19) cite le cas du bull-dogue du commandant Habert ; le chanoine François Provost (p. 113) rapporte le cas du commandant Bréqueville du 2e bataillon des mobiles d’Eure-et-Loir accompagné jusqu’à sa mort par sa chienne qui fut rendue plus tard à sa veuve ; Adolphe Lécluselle (p. 231) rapporte le cas similaire d’un chien appartenant à un certain M. Legrand.
Des chiens sont aussi attachés aux Ambulances. Ils peuvent aider à retrouver les blessés oubliés sur le champ de bataille. Recueilli dans les ruines de Bazeilles et baptisé Toto, un « chien mouton » devient celui de l’ambulance du docteur Amanieu (p. 65) ; celui du docteur Autier (p. 94), un barbet blanc, le suit pendant dix mois ; Mirza, une épagneule, accompagne les casquettes blanches de la Croix-Rouge[8].
Le chien du capitaine de Boysson devient le protégé de tout son bataillon raconte P. Grolleau (p. 49). En général, toutefois, les chiens adoptés par des unités militaires sont différents des bêtes qui accompagnent leurs maîtres officiers. Ce sont plus souvent des chiens errants. Comme le fait observer Olivier Berger, l’animal est un « accessoire » qui sert à marquer les distances entre l’aristocratie militaire et la troupe.
Le chien est un compagnon dont les soldats ont besoin. Il sert de mascotte, même si le terme n’est pas utilisé. Ces chiens reçoivent un nom (Zéphyr, Moblot, Blocus, Uhlan, Bretagne, Couscous, Fox, Black, Sibeau…) souvent signifiant dans le cadre du conflit. Ils font l’objet de toutes les attentions. Leurs protecteurs peuvent risquer leur vie pour eux. Dans Le Temps du 15 octobre (p. 2), le compte-rendu militaire du siège rapporte le cas d’un soldat se repliant en boitant, conduisant « en laisse le brave chien noir du bataillon » qu’il a été chercher.
Ces chiens qui partagent la vie des soldats leur servent de sentinelles. Les chiens défendent le territoire de leur maître et sonnent l’alerte mieux que n’importe quel soldat. « Nobé est soldat lui aussi » écrit précisément Josset (p. 56) à propos d’un vieux chien qui ne quitte pas les défenseurs de Belfort. À Paris, Gustave Ramon (p. 669) note que des chiens de berger sont utilisés pour la sûreté des avant-postes.
Les Prussiens semblent user plus systématiquement des chiens comme sentinelles, affectant parfois à cette tâche des bêtes qu’ils ont amenées avec eux. Arthur Stievenart[9] évoque les craintes des Allemands autour de Mézières héritées des campagnes de 1813-1814 : les sentinelles attachaient des chiens en avant de leurs positions qui les avertissaient au moindre bruit. Lucien-Louis Lande rapporte la même pratique près du Four-à-Chaux de Champigny[10]. La presse s’en fait régulièrement l’écho (Le Gaulois du 12 novembre ou Le Courrier de Bourges du 30 décembre, par exemple).
Ces chiens-sentinelles sont aussi utilisés par les Prussiens comme « traqueurs ». Tel est le terme pour désigner des bêtes chargées de « dépister les passants et poursuivre les fuyards »[11]. Édouard Delalain les présente comme des chiens renifleurs : ils s’approchent des Français, « les flairent et se retirent en aboyant »[12]. Le lieutenant-colonel des Moutis raconte la traque par des chiens à laquelle fut soumis pendant vingt minutes le capitaine Houdellière[13]. Sans être généralisée, la pratique est courante.
Mais la guerre est aussi l’occasion de tester d’autres usages qui font des chiens de véritables auxiliaires militaires. Les services ne sont pas inédits, mais leur systématisation tend à se répandre.
Première fonction : les chiens messagers. Les Français ont beaucoup misé sur ce rôle. C’est affaire de situation. Leurs communications étant coupées dans le cadre des sièges, ils développent le recours aux animaux (pigeons et chiens). De nombreuses initiatives individuelles ressortent des sources. Le Petit moniteur universel du 22 décembre (p. 2) rapporte le cas d’un chien près d’Autun auquel un garibaldien confie un message pour appeler du soutien. La Patrie du 28 octobre relaie la réflexion plus générale qui se diffuse dans les rangs et suggère de se saisir de chiens qu’ils feraient retourner chez leur maître. Le côté aléatoire montre les limites d’une telle pratique, mais l’expérience ne laisse pas le service des Postes indifférent. En témoigne les messages diffusés dans la presse ! En janvier, le Préfet de police de Paris publie une circulaire avertissant les avant-postes de ne pas tirer sur les chiens de berger et de les laisser « retourner librement chez leur maître » au prétexte qu’ils peuvent être porteurs de dépêches[14]. Le 13 janvier, cinq chiens sont embarqués à bord du ballon Le général Faidherbe. Mais ces chiens peinent à traverser les lignes prussiennes. Ils échouent d’autant plus que les avertissements publiés dans les journaux informent l’ennemi qui redouble de vigilance. Les Prussiens expérimentent aussi l’idée (Le Siècle du 21 novembre, p. 2). Mais, globalement, les résultats sont décevants.
À défaut de succès, des mobiles s’amusent à créer du faux messager[15]. Peut-être est-ce le cas pour « L’espion quadrupède » que cite La Gazette nationale du 6 octobre : à la porte de Choisy, les gardes nationaux interceptent un chien « qui venait du dehors ». Dans le collier qu’il portait, ils trouvent un billet « dont l’orthographe défectueuse pouvait être une révélation ». Le lecteur n’en saura pas plus. Le cas témoigne toutefois des tentatives d’utilisation des chiens comme messagers, leurres, voire espions. En rase campagne, ces messagers sont moins ciblés, donc plus efficaces. L’exemple de Larbi en atteste. Son histoire ponctue le récit d’Eugène Müller[16]. Larbi y joue un peu tous les rôles, portant des messages codés, avertissant les hommes, jouant les éclaireurs.
Les chiens « espions » ou « mouchards » sont une variante des « messagers ». Contrairement aux sentinelles, les bêtes concernées sont « dressées » à la fin qui leur est confiée. Le Rappel du 18 janvier parle de chiens utilisés par les Prussiens pour communiquer avec leurs espions installés dans Paris. L’exercice est toutefois assez aléatoire et dangereux. Ces chiens sont aussi l’accessoire dont s’équipent des espions prussiens déguisés en bergers. Le cas est rapporté dans plusieurs média (Le journal de Cote d’Or, Le Journal de Roanne du 16 octobre ou Le Siècle en décembre).
Les chiens sont également présents lors d’assauts comme figuré dans une lithographie de Jules Férat représentant la bataille de Gravelotte. Si le fait n’est pas sans précédent, il semble prendre de l’ampleur en 1870. Volontaire à la 2e armée de la Loire, Marcel Lescot témoigne de la présence de trois chiens de chasse lors d’une manœuvre, lesquels lui rappelle un chien nommé Bretagne qui le précédait lors d’un assaut à Beaune[17]. Il n’y a rien de tactique en l’occurrence. Les chiens qui accompagnent les troupes, s’agitent autour d’elles et se retrouvent sur le champ de bataille plus par hasard que selon des plans préétablis. Les nombreux témoignages de chiens retrouvés morts sur les champs de batailles ne doivent pas tromper sur ce point, la propagande pouvant se charger de transformer des chiens imprudents en héros de la Défense nationale. Ces chiens sont plus souvent des accompagnateurs inconscients des dangers qu’ils encourent. Quelques expériences sont toutefois tentées. Sous le titre « les molosses et les fusils de rempart des Prussiens », Le Constitutionnel du 8 novembre (p. 2) rapporte l’existence d’une « armée de magnifiques danois » que les Prussiens lancent en avant-garde sur les lignes françaises pour en repérer les positions. Les chiens ayant flairés les soldats embusqués, ils aboient et se retirent. Le journal assure que du côté de Joinville, les mobiles ont tiré « près de cinq cent coup de fusil contre ces molosses » sans en atteindre un seul. S’il y a probable exagération dans le récit, rien ne permet de le mettre totalement en doute. Ces chiens éclaireurs inspirent les observateurs français. Le Soir du 5 octobre (p. 2) suggère que chaque régiment se dote de chiens qui alerteraient leur maître de la présence de l’ennemi. La question est à l’ordre du jour. Sous le titre « stratagèmes prussiens », Le Paris-Journal du 10 novembre (p. 2) raconte comment les assiégeants munissent leurs chiens de falots pour faire croire à la présence d’une patrouille, tenir les défenseurs en éveil, les fatiguer et gâcher leurs munitions.
Le nombre conséquent d’hommages rendus à des chiens « morts au champ d’honneur », souvent auprès d’un maître qu’ils ont suivi dans l’idée de le protéger ou aider, témoigne de cet auxiliariat canin au service des troupes : Mirza, la chienne du sous-lieutenant Besnard[18] ou Black du franc-tireur du Mont-Blanc Carrier qui « a bien mérité que son nom soit rappelé en ce récit » pour tous les services rendus à la brigade[19].
Olivier Berger avait raison de rester prudent. La nature des sources ne permet aucune évaluation précise des pratiques. Qu’ils soient émis en direct dans les journaux ou publiés plus tard, beaucoup de récits sont de valeur incertaine. Exagérations, inventions et rumeurs entachent certains d’entre eux. Leur nombre autorise toutefois à penser que les chiens pendant la guerre franco-prussienne n’ont pas été que des bêtes de consommation. Leur utilisation fut aussi variée que possible. Elle se fit au gré des circonstances et de manière souvent improvisée. Les anecdotes dont ils sont l’objet témoignent de leurs rôles. Elles constituent un panel d’expériences que les refondateurs des armées après la guerre n’ont pas oubliées. En 1887, le lieutenant Jupin mit au point un projet d’unités canines inspiré de celles créées en Prusse[20]. Il recense cinq fonctions pour les chiens, dont trois furent expérimentées en 1870 : éclaireurs, sentinelles et transmetteurs de dépêches. Les deux autres ont pu être testées bien que les témoignages soient plus rares : détecteurs de blessés sur les champs de bataille et pourvoyeurs de munitions pendant les combats. Les chiens de 1870 furent des acteurs à part entière de la guerre et pas seulement comme aliment de substitution.
[1] Berger, Olivier, "Chiens des Français, chiens des Allemands : une représentation particulière durant l'occupation de 1870", Une bête parmi les hommes : le chien. De la domestication à l'anthropomorphisme, Troisième rencontre internationale des Bêtes et des Hommes. Amiens, Encrage Université, 2014. p. 365-382.
[2] Castan, Auguste, Journal, Bibliothèque d’étude de Besançon, Fonds Auguste Castan, Manuscrit 1838.
[3] Trochon, Paul, Souvenirs d'un franc-tireur en 1870-1871 : simple contribution à l'histoire des corps francs pendant la guerre franco-allemand, Paris, 1901 ; p 68.
[4] Cochard, abbé Théophile, L'Invasion prussienne de 1870.... Les Bavarois à Orléans, Orléans, 1871 ; p. 90-91.
[5] Cas cité par Olivier Berger, Op.cit., p. 374.
[6] Bernot, J-B, Châteaudun ! (épisodes de la guerre de 1870), Paris, Dreyfous, 1888 ; p. 97.
[7] Hupin, Ernest, Les Moblots sedanais à Givet & dans le Nord en 1870-1871, Sedan, 1893 ; p. 10.
[8] Maricourt, baron Léon de, Casquettes blanches et croix rouge, souvenirs de 1870 : Coulmiers, Faverolle, Loigny, l'ambulance, Paris, 1892 ; p. 89.
[9] Stievenart, Arthur, La Défense nationale : souvenirs de la guerre de 1870-1871 dans le Nord-est, Lille, 1904 ; p. 56.
[10] Lande, Lucien-Louis, Souvenirs d'un soldat, Paris, H. Lecène et H. Oudin, 1886 ; p. 157.
[11] Cherbuliez, Joël, Guerre de 1870-71 : impressions et souvenirs du siège de Belfort (…) par un volontaire de l'armée de Belfort, Paris, J. Cherbuliez, 1871 ; p. 55.
[12] Delalain, Édouard, Tablettes d'un mobile : journal historique et anecdotique du siège de Paris (du 18 septembre 1870 au 28 janvier 1871), Paris, 1871 ; p. 190.
[13] Des Moutis, lieutenant-colonel, Mémoires sur l'armée de Chanzy ; Le 49e régiment des mobiles de l'Orne, 1870-1871, Alençon, Impr. de E. de Broise, 1872 ; p. 164.
[14] Avertissement cité par le baron Camille La Roncière-Le Noury, La marine au siège de Paris : guerre 1870-71, Paris, Plon, 1874, p. 321, et par le baron Alfred de Montvaillant, La Garde mobile de l'Hérault au siège de Paris : impressions et souvenirs d'un chef de corps, Montpellier, Imprimerie centrale du Midi, 1872, p. 159.
[15] Voir Jean-Baptiste Mazères, Les mobiles de Rennes au siège de Paris : (du 7 septembre 1870 au 13 mars 1871), Rennes, Impr. Leroy et fils, 1871 ; p. 79.
[16] Muller, Eugène, Souvenirs d'un jeune franc-tireur, Paris, Lefèvre et Cie, 18 ??.
[17] Lescot, Marcel, Notes et impressions d'un volontaire de 1870, Blois, impr. de C. Migault, 1901 ; p. 67.
[18] Maricourt, Léon de, op. cit. ; p. 89 et 116.
[19] Mogenier, Joseph, Les Francs-tireurs du Mont-Blanc : récits de la guerre de 1870-71, Annecy, 1902 ; p. 31.
[20] Voir Jupin, lieutenant, Les Chiens militaires dans l'armée française, Paris, Berger-Levrault, 1887 ; Le Chien de guerre moderne et le nouvel armement : tactique et chiens de guerre, Paris, Berger-Levrault, 1890.